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Jazz à Paris
29 avril 2021

Makoto Sato, Michel Kristof, Julien Palomo « Heaven of Discontent »

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Julien Palomo (synth) et Michel Kristof (g) enregistrent en duo sous le nom de « Other Matter ». Ils se sont souvent retrouvés chez Makoto Sato (dm) pour des concerts à domicile. Outre le plaisir qu’ils ont prodigué au public, ils ont pu ainsi rôder sérieusement leur trio. C’est pourquoi ils avaient déjà publié en 2018 un album live (voir playlist de Makoto Sato), « qui dévie de l’impro, de l’electro, et de bien d’autres choses pour se frayer un chemin spécifique ».

Et aujourd’hui ils récidivent, avec un brin d’humour et de tendresse. D’abord avec ce titre «Heaven to discontent » (paradis du mécontentement selon Google), puis ce « Prelude to a slap » (un pied de nez au célèbre standard) et « I remember Oki », la tristesse du départ de notre Itaru, en écho à celui, plus lointain, d’un autre trompettiste éblouissant, Clifford Brown.

La musique reste inclassable. On retrouve chez Julien Palomo ce mélange de strates brouillées envahissantes, provocantes, de tourbillons parfois comme avalés, quelques images sonores telles ces gouttelettes enserrées dans un magma, le feu et l’eau si proches (un salut à B. Parmegiani ?). 

Dans «Prelude To a Slap», on aurait pu s’attendre à une guitare soit enjôleuse (Prelude To a Kiss) soit claquante (le dit slap), mais c’est un Michel Kristof à la fois rebelle, revêche ... et presque timide, qui rôde autour de la batterie, qui brasille au voisinage du synthétiseur, qui déverse des micro rafales acides, des stridulations à moitié contenues sur les cordes. Lors du thème dédié à Oki, il nous prodigue un chant hors format, d'un lyrisme qui s’affranchit des codes.

Makoto Sato, quant à lui,  nous martèle des frappes sans repère de tempo, nous asphyxiant presque. Il déverse des éboulements rocheux, des avalanches chaotiques. Il bouscule cette musique, l’encourageant à sortir de toute balise. 

Encore un chant étrange, un peu lointain, brouillé, pour « Heaven of Discontent », des quasi pépiements, des ronflements, des agrégats de matières sonores, des notes répétées sur les cordes, une forme de chant introspectif, sans direction. Le tapis de bombes de Makoto Sato se met alors en place. Un maelstrom de stridences, de percussions, de mitrailles.

Une accalmie relative survient sur la dernière piste, « It Starded To Snow ». Avec un titre pareil, on s’attendrait à l'évocation d’une certaine nature, mais ce trio nous a habitué à des pieds de nez. Un univers quasi sidérurgique où guitare et cymbales se rejoignent, un mouvement assez lent, des notes claquées, des crépitements de cordes, une proximité qui fait perdre tout repère entre guitare et synthétiseur, et des frappes sourdes et continues sur les peaux, comme si le cœur de cet animal étrange allait rompre. 

C’est un album qui nécessite une écoute exclusive, attentive. À ce prix, l’hypnose se déploie, l’intérêt est cadenassé, l’addiction pour cette musique rebelle s’installe. Le corps, les muscles sortent un peu tétanisé par l’énergie  des flux, des discours, par la profusion des timbres, sans verser, à mon sens, dans la Noise. Nous profitons là d’un compagnonnage entre de (relatives) jeunes pousses qui œuvrent dans les marges et un talent du Free, de l’impro, confirmé de longue date. Mais ce dernier ne s’en laisse pas compter. Il propulse le groupe et nous captive. Tous trois défrichent, dans un mix de délicatesse et de sauvagerie, un peu hors des repères de chacun. Une musique qu’il faudrait savourer à proximité immédiate des musiciens, peut-être un jour à Aulnay-sous-Bois sous Bois, mais pour le moment de bons casques feront l’affaire. 

Le titre complet de l’album : « if hell is full of good meanings, then Heaven must be filled with discontent »

Un avant goût ?

Et pour ceux qui en voudraient davantage, un bonus track numérique est disponible : 

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