Platel, Monterverdi, musique manouche et jazz
Alain Platel a eu la bonne idée de mettre en scène la musique de son ballet contemporain « VSPRS » au Théâtre de la Ville (du 16 au 25 février 2006). La musique n’est pas enregistrée, et les musiciens ne sont pas dans un fosse d’orchestre ou derrière un rideau : ils jouent devant nous, sortent parfois de leur espace pour se mêler aux danseurs. C’est une première surprise.
La deuxième, au plan musical, est de « fondre » la musique de Monteverdi dans un jazz swing coloré de musique manouche.
Tous les ingrédients sont donc réunis pour faire craindre le pire.
Et pourtant, ça passe plutôt bien. La composition a été confiée à Fabrizio Cassol, saxophoniste du groupe Aka Moon, et sur scène, les musiciens manouches, baroques et jazz cohabitent sans problème. La musique reste souvent assez sage, et en l’absence de « projection sonore » un peu à l’image de la musique électroacoustique, les sonorités des différents instruments sont un peu écrasées. Deux exceptions :
- lorsque les musiciens occupent le centre de la scène, l’espace physique entre eux semble se refléter dans le spectre sonore
- dans le dernier quart d’heure, lorsque la musique s’emballe, on retrouve des sonorités chatoyantes. J’ai parfois pensé à celles de Mingus, en particulier celles du « Black Saint – Sinner Lady ».
Le décor est assez étrange : une sorte de banquise de tissus blanc, avec sur la grève, la place réservée en principe à l’orchestre.
Et le ballet ? Je dois dire que j’ai été impressionné par le projet d’Alain Platel donnant à voir diverses formes de transes, des phases frénétiques, des sculptures corporelles magnifiques, des « phrases chorégraphiques » en solos ou duos juxtaposés, probablement effroyablement difficiles à réaliser.
Le regard est toujours captif, parfois pas assez rapide pour saisir les différentes scènes qui s’offrent à nous.
En revanche, la trajectoire dramatique du ballet ne m’a pas semblé évidente.
Troupe : Ballet C dela B
Au sortir du Théâtre du Châtelet, marchant sous la fine pluie de Paris, le plaisir de ce spectacle vivant et complet me faisait sourire, longuement.
PS : le plaisir du jazz et de la danse nous est aussi proposé par les Dodécadanses du Triton (10 € !). Au programme le 25 février : Julyen Hamilton & Daniel Humair
photo : www.petit-bulletin.fr