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Jazz à Paris
19 février 2008

Benjamin Sanz et ses amis américains

Ce jeune musicien joue très souvent avec la crème des artistes noirs américains, alors qu'il est à peine connu en France et qu'il n'a pas encore publié de CD (il remédie à ça bientôt); d'où l'intérêt d'en savoir plus sur son itinéraire.

 "Tu dis aimer jouer avec eux, mais eux pourquoi jouent-ils avec toi ?"

07_12_14_03_SanzParce qu'ils aiment bien jouer avec moi. On joue avec des gens parce qu'on pense qu'ils peuvent coller avec votre propre forme d'expression.

J'ai joué des musiques improvisées quand je suis arrivé à Paris en 99.
J'ai commencé à jouer avec des gens de la scène parisienne, comme Matthieu Jérôme, Arnaud Moulin, Maxime Delpierre. J'étais en contact avec des gens qui m'ont bien influencés comme le batteur Philippe Gleize.
On jouait dans les squatts parisiens, notamment "Les Falaises" qu'on a ouvert avec le collectif "Wax" et à d'autres endroits comme le Studio des Ilettes, ou des squatts artistiques comme le Magic Palace Hôtel ou le Théâtre 347.
Quand ces lieux ont fermé, j'ai senti le besoin d'acquérir une pulsation forte.
J'adorais les sons et la créativité de la musique improvisée, à laquelle je suis toujours attaché, mais j'avais besoin de groove.

En 2000, j'ai commencé à voyager en Afrique et aux Etats Unis. J'ai été au Mali, au Sénégal, à New York, à Kansas City. J'ai alors arrêté de jouer du jazz pour ne faire que de la musique africaine pendant bien trois ans. Mais j'avais toujours cette culture de jazz et de musique improvisée qui m'était chère.

Après, j'ai joué avec David Murray.
Il passe son temps autour du monde. Il tourne tout le temps; il enregistre tout le temps; ça fait 30 ans que ça dure. C'est quelqu'un d'assez exceptionnel.

Je me suis trouvé à jouer avec lui, parce qu'il animait une fête de quartier devant un café, à Paris. Il y avait Rasul Siddik à la trompette, Raymond Doumbé à la basse, le grand Mokeit Van Linden, etc. Ce n'était pas un groupe, c'était une réunion. Il y avait beaucoup de musiciens, mais il n'y avait pas de batteur. Moi, je passais par là. On se côtoyait depuis quelques temps mais sans vraiment communiquer. David Murray savait que j'étais batteur. Il m'a dit "You're drummer, come, bring your drums" et là j'ai couru vite fait à mon local et j'ai ramené un tom basse que j'ai mis en grosse caisse, une caisse claire, une charley, une cymbale ... et j'ai commencé à jouer avec eux, et faut dire que ce jour là j'ai bien joué. David Murray a été emballé, et depuis, tous les deux mois, quand je le croisais, il me disait "I'm gonna make you work".

Et il l'a fait.

Il m'a branché pour remplacer Hamid Drake au sein de son groupe, les Gwoka Masters. J'ai fait quinze dates avec eux, aux Etats Unis, et deux ou trois dates en Italie, en été 2004.

Et puis je suis rentré à Paris. La situation n'avait pas changé. Toujours peu de concerts : ça ne bougeait pas beaucoup. J'ai donc démarré mes jam sessions trois mois au retour de la tournée ... et voilà : c'était déjà là, plus ou moins.

Ce que je trouve en commun avec des gens comme Rasul Siddik, David Murray, Sabir Mateen, Ernest Dawkins, Bobby Few, ces gens avec qui j'ai eu l'occasion de jouer - j'ai joué aussi avec Oliver Lake, qui est un grand musicien, Joe Fonda, Napoleon Maddox - c'est que lorsqu'ils jouent, ils prennent toute la vibration qui est dans la salle, ils font deux trois notes et ils mettent le groupe au diapason. Ils synthétisent l'ambiance du lieu et du moment : c'est très important.

"C'est David Murray qui a parlé de toi aux autres musiciens ?"

J'en sais rien, en fait.
Bobby Few m'a appelé, il n'y a pas longtemps, pour le concert aux 7 Lézards : c'est l'un des plus beaux concerts que j'aie fait. C'est Rasul (Siddik) qui lui avait donné mon numéro. Il ne m'avait jamais entendu. C'est le bouche à oreille qui joue, oui.

"C'est ainsi que les musiciens qui sont de passage à Paris entendent parler de toi, t'engagent, et comme ils sont contents du moment passé avec toi, ils en reparlent encore à d'autres et ça marche comme ça."

Oui .. et après ça me met la pression, la bonne pression.
Avant je travaillais beaucoup mais je ne savais pas trop où ça allait me mener. En fait, il faut travailler pour être prêt pour le jour où l'occasion se présente de montrer ce qu'on peut faire ...

"... et Sunny Murray ?"
Sunny Murray c'est l'un de mes maîtres.
C'est l'une des toutes premières personnes que j'ai rencontré quand je suis arrivé à Paris. Il m'a énormément appris, musicalement, sur l'histoire. Il m'a aussi appris à avoir un esprit critique.

Il a joué récemment avec les plus grands musiciens du free, c.a.d. la musique des noirs américains de la fin des années 60 jusqu'à maintenant. Il y avait Henry Grimes, Sabir Mateen, Rasul Siddik, Sonny Simons, Bobby Few, il y avait toute la bande de Philadelphie etc. ... des gens qui comptent énormément dans l'histoire du jazz.

Mon objectif est de jouer avec le plus de musiciens possible, des grands musiciens.
A la réflexion, mon but initial quand j'ai décidé de jouer du jazz, c'était ça : jouer avec des grands musiciens.
Mes musiciens préférés à Paris, je joue avec.
Et mes musiciens préférés à New York, il se trouve que je joue aussi avec.
Mais qu'est-ce qui m'a amené à tout ça ? Ben c'est l'amour.
J'aime les gens, j'aime la communication. En concert, faire jouer les autres, ça n'a pas de prix, aujourd'hui.

C'est un produit intérieur. Ce n'est pas un produit intérieur brut, c'est un produit intérieur doux.

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Commentaires
P
j'avions pas vu !<br /> <br /> ;-)
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D
Il y aura une suite la semaine prochaine.<br /> Pour le concert de Bobby Few et Fabienne Audeoud et ..., j'ai aussi annoncé ce concert sur jazzaparis 2 (publication le 5) : ce sera une chouette soirée à recommander<br /> http://jazzaparis2.over-blog.com/article-16804008.html
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P
Excellente interview ! Il participera également avec Bobby Few à cette performance d'artiste que j'annonce içi :<br /> http://cooldesource.blog.lemonde.fr/2008/02/19/the-danger-of-jazz-in-art/<br />
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