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Jazz à Paris
23 juin 2008

Première galette : Art Blakey - Three Blind Mice

Art Blakey - www.brunijazzart.com
Art_Blakey___brunijazzart_comPremière galette : le premier achat d'un disque de jazz. C'est le thème retenu cette fois par le Z-Band (voir plus bas) pour publier le même jour une petite chronique.

Pour moi, ce fut trois souris aveugles.

Disons les choses simplement : tout ça, c'est la faute à Claude François !
Faut comprendre : moi j'étais rock. Alors entendre seriner à la radio "Une petite mèche de tes cheveux" par Cloclo, c'était trop nian nian ! A l'époque, j'ignorais qu'il y avait un certain Jean Louis Chautemps dans son orchestre, mais là n'était pas la question.

Pourquoi tant de haine, me diriez-vous, face cette comptine propulsée au rang de hit impossible à éviter ? Allez savoir !
Petite pause info pour les savants : veuillez trouver au bout du click les paroles françaises.

Lors d'une de mes déambulations à la Samaritaine*, rayon microsillon, j'entends à nouveau ce thème, mais version musclée, avec une pochette affreuse vert pomme, orange et blanche (45 tours), et le titre "Three Blind Mice", par Art Blakey et ses Jazz Messengers.
Comme beaucoup le monde à l'époque, j'avais repéré le générique de l'émission de télé consacrée au cinéma, mais j'ignorais qu'il s'agissait de "Blues March".

Bref, c'était mûr. Premier 45 tour de jazz : Three Blind Mice. Allez, on partage !

Puis, comme un goinfre, un 2eme 45 tour : Dat Dere, puis Moanin'.
L'antidote était trouvé, durablement.

Ce courant, le hard bop, était parfois présenté comme un peu passéiste par rapport à un free jazz émergent. Avec près d'un demi siècle de recul (oh, ça va ! la ramenez pas !), j'ai le sentiment qu'on y retrouve au moins trois points communs saillants : le retour aux racines de la musique noire : le blues; l'énergie, l'urgence de la musique; la rupture assumée avec l'esthétique blanche.
En réécoutant ces 4 thèmes, ces 4 vidéos, on ne peut qu'être frappé par la puissance de ces Messengers, par leur inspiration. Un regret : ne pas les avoir vu sur scène. J'en aurais été profondément déchiré. Cette musique fait depuis partie de mon patrimoine, quasi génétiquement.

Peu de mois après, arrive dans les bacs un 33 tour essentiel : My Favorite Things, de Coltrane, avec Elvin Jones à la batterie. Naturel de passer d'Art Blakey à ce nouveau géant de la batterie : tous les deux impulsent leur groupe, puisent leur inspiration en Afrique, sauvagement. Je ne m'y étendrais pas : Denis va en parler. Simplement préciser que c'est le disque que j'ai le plus écouté ... mais ce n'était pas mon premier 33 tour. Venons-y.

Toujours à la Samaritaine, une belle pochette de 33 tours, cette fois, avec un titre accrocheur : Lonely Woman par le Modern Jazz Quartet, que le vendeur (je lui dois tant) mettait sur sa platine. Autre forme de séduction. On peut aller sur Amazone pour en écouter un bout.

MJQ_Lonely_Woman

Pas de violence musicale. Le lyrisme et la retenue en même temps. Et puis un curieux mélange de classicisme et de couleurs bleues, la tentation de la respectabilité blanche, le Third Stream. Lire ce qu'en disait (en anglais) All Music .

Premier 33 tour, donc, mais avec le désir d'en savoir plus sur cet étrange compositeur : Ornette Coleman.
On m'avait parlé de lui, lors de ces rencontres enfiévrées chez un des rares disquaires d'alors proposant des produits d'importation : très bon compositeur mais bien piètre musicien. Facile d'en sourire maintenant ! On parlait alors "d'expériences" avec l'idée qu'elles ne mèneraient probablement à rien.

Mais avec "Una muy bonita" et bien d'autres de ses thèmes ravageurs d'alors, Ornette (déjà "Coleman" était inutile) s'installait comme un pilier de la musique en mouvement.
J'ai retrouvé deux versions vidéos de Lonely woman : l'une, sur un montage de photos, l'autre lors d'un récent concert en 2007 en Italie.

Ainsi, grâce à ce haut lieu de la culture musicale que fut la Samaritaine, deux passerelles vers le nouveau jazz, la new thing, étaient jetées, durablement.


Biographie  d'Art Blakey sur All Music Guide dans la lignée de l'opposition hard bop - free. Je n'ai pas trouvé d'article examinant leurs ressorts communs.
Sur le même site, une discographie d'Art Blakey.
Article Wikipedia sur l'album "Three Blind Mice"

Musiciens sur Three Blind Mice :
    * Art Blakey, drums
    * Wayne Shorter, tenor saxophone
    * Freddie Hubbard, trumpet
    * Curtis Fuller, trombone
    * Cedar Walton, piano
    * Jymie Merritt, bass

Les "Premières galettes" du Z-Band :
> My Favorite Things (Coltrane) par Denis Desassis (Maître Chronique) ;
> Bag's Groove (Miles, Monk, Rollins, Bags et les autres) par Ptilou ;

> The Genius (Art Tatum) et At The Blackhawk (Monk) par Jazzques ;
>
Music Makers (Helen Merrill - 1986) par Jazz Frissons ;
> Round About Midnight (Miles) par Belette  .

* : La Samaritaine (pour les non parisiens) : Ce fut un grand magasin qui s'étendait sur un ensemble de quatre immeubles entre la rue de Rivoli et la Seine, à la hauteur du Pont Neuf. Sa caractéristique ? On y trouvait absolument de tout. Aujourd'hui, une part est ouverte sous d'autres enseignes (Kenzo ...), l'autre est fermée pour des raisons de sécurité.

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Commentaires
P
Cascade en effet ou branche d'arbre (comme ces poster à Londres ou Frisco résumant en branches diverses l'histoire du Rock ou du Jazz)
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D
Cette métaphore de l'eau me convient bien : on ne peut prédire exactement où la rivière va couler, mais ce qu'on sait, c'est qu'elle suivra une courbe de descente. Un rocher, et elle s'écartera, puis sera prise dans une pente nouvelle ... <br /> Je viens d'assister au 3e concert de John Zorn à La Villette, et j'y ai vu un public assez jeune, certains ignorant tout du jazz, davantage attirés par un rock inventif, par un son neuf, radical, Electric Masada. Fouilleront-ils pour trouver la Great Black Music ou John Zorn ménera-t-il certains à écouter des musiques hors des sentiers du jazz ?<br /> Vraiment féconde ta métaphore, Jacques.
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D
Rôle important d'initiateur que celui des disquaires. Les écoutes en ligne actuelles permettent d'entendre un musicien, mais le conseil individuel pour la découverte, l'initiation , c'est une autre histoire.
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J
Mon premier contact avec Blakey, c'était "Night In Tunisia". Quel batteur! Et lui aussi savait s'entourer.<br /> <br /> C'est marrant aussi de lire chez chacun cet effet quasi identique de "la cascade"... un album en entraîne un autre.<br /> <br /> A+
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P
Ah, l'évocation du lieu d'achat. Je n'étais pas "Samar" , mais "Printemps Hausmann", à cause de la proximité St Lazare depuis ma banlieue proche... Mais les rayons et les conseils des grands magasins de cette époque étaient d'une toute autre qualité qu'aujourd'hui (au classique comme au Jazz...). On y faisait son initiation.<br /> <br /> A St Lazare (gare) il y avait également un disquaire : sorte de magasin aujourd'hui oublié et quasi disparu... Le Discobole (de mémoire) avec des cabines "d'essayage" pour écouter les vinyles avant d'acheter.<br /> <br /> Ah le "blues march" était une sorte d'hymne à la modernité. Comme en plus il a fait office de générique radiophonique pendant des années; C'est devenu un vrai "jingle" avant l'âge...<br /> <br /> Grand bonhomme que Blakey avec ses Messengers toujours renouvelés... De l'importance des maîtres mettant les jeunes en avant jusqu'à ce qu'ils prennent leur envol : Blakey, Miles, Zappa, Zawinul par exemple...
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