Atomic Spoutnik : Valentin Ceccaldi et le grand ensemble du Tricot
Atomic Spoutnik (TRICO 09)
Atomic Spoutnik (par le grand orchestre du Tricot dirigé par Valentin Ceccaldi) a été présenté au théâtre de Vanves le 4 février pour accompagner la sortie de l'album.
Cette musique est une suite. Les neuf pistes n'ont aucun titre; elles s'enchaînent naturellement. Les césures correspondent à des zones de moindre intensité. En fait, c'est une trajectoire, céleste.
Cette suite est bien difficile à associer à une quelconque esthétique tant elle présente de multiples facettes. Alors il faut céder la place à l'imaginaire .
Elle commence, en effet, par des bribes bruitistes comme suspendues, auxquelles vient se superposer une amorce de mélodie, sur deux notes. Un leitmotiv pour installer une couleur, un bain sonore ténu, qui prend corps progressivement, et qui se trouve littéralement transpercée par un sax (?) au cri puissant, éraillé, désespéré au delà de toute raison. L'orchestre l'accueille, l'enveloppe, le submerge par une mélopée lente; les frappes s'alourdissent puis tout s'éteint.
Et comme une respiration, ce même cycle revient. Une note tenue longuement, un segment mélodique comme posé à la surface d'un bain orchestral ténu, de nouvelles plaintes qui se prolongent avant que l'orchestre ne surgisse avec des rythmes lourds, noyant ces cris dans une grande coulée chaotique.
Puis surgit le rêve, celui d'un enfant émerveillé par une comète et qui, devenu grand, prend la décision : "au prochain passage d'une comète, démarrage immédiat, hop, pas de plan prédéfini", on embarque, "... rien que de l'imprévu". Les scientifiques sont d'accord, mais ils demandent des relevés, des mesures, disent comment présenter l'humanité aux êtres des autres mondes. Et c'est parti.
Le message de l'humanité est bien fragile. C'est une sorte de discours déclamatoire déjanté, devenant délire ("promenons-nous dans les bois") placé dans une boucle orchestrale répétitive. De plus, l'ensemble se dérègle, part en vrilles, entrecoupé de séquences mélodiques répétitives, au sein de lourdes frappes.
La comète est là ? Le discours devient hésitant, comme si sa proximité déréglait tout, brouillait la raison, les paroles, les sons. Une sorte de ritournelle émerge, au violoncelle, comme parasitée, et vient pincer notre cœur. Les autres instruments s'en mêlent, délicatement .
Après une séquence "métal" et des rondeurs d'orchestre, une petite chansonnette, comme une métaphore du voyage inexorable de la comète au milieu des étoiles. Une forme de valse incertaine, fragile, prête à dérailler, et qui effectivement s'épanouit en un pur maelstrom sonore qui aurait ravi Mingus. Un ostinato, une musique comme en pointillé et un discours lointain, nasillard, qui émerge peu à peu. On peine à comprendre. Probablement, notre voyageur. C'est une sorte de compte rendu de découverte, très prosaïque, où l'on apprend que les choses sont très différentes, que le soleil n'est pas pareil ... On n'en saura pas vraiment plus, ce discours finissant par être brouillé, lointain, supplanté par les bruits blancs de l'espace, manière de vous égarer avant de vous quitter.
Une musique splendide. Une folle apnée onirique de près d'une heure. Une forme d'épopée poétique. Laissez-vous happer par cet univers.
Et si vous en avez le temps, reprenez le voyage .
Deux pièces vous sont proposées à l'écoute là
LINE-UP André ROBILLARD : récitant Robin MERCIER : récitant Théo CECCALDI : violon, alto, clavier Gabriel LEMAIRE : saxophones, clarinettes Quentin BIARDEAU : saxophones, objets Jean-Brice GODET : clarinettes, dictaphones Roberto NEGRO : claviers Guillaume AKNINE : guitares, banjo Valentin CECCALDI : violoncelle, basse Florian SATCHE : percussions, objets Adrien
http://www.tricollectif.fr