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Jazz à Paris
31 août 2020

"Un Musicien Rhizome" (par Pascal Marzan pour Simon H. Fell)

Garden Concert Pascal Marzan

English version below, under the video

Simon Fell,

je me rappelle le jour de notre rencontre à Londres, le 7 mai 2007 lors du festival Freedom of the city, au Red Rose, un « Comedy Club » qui accueillaitentre autres le Mopomoso de John Russell et le London Improvisers Orchestra. Cette édition du festival aujourd’hui disparu a été enregistré par la BBC pour le programme Jazz on 3. 

Ce jour là, j’étais invité à jouer un solo, le seul solo du festival, alors que j'aurai aimé jouer avec tant d'autres présents ce jour là comme John Russell, Ute Wasserman, Chris Burn, Philipp Wachsmann, Alex Ward, Dominic Lash, Hannah Marshall, Javier Carmona, Paul Rutherford, Marcio Mattos, Veryan Weston, Evan Parker, Agustí Fernández,John Edwards, Eddie Prévost … Musiciens qui devinrent pour certains des amis proches, des compagnons de jeuainsi que des invités du Festival R de Choc à Paris que j’organisai avec Catherine Karako.

C’est Jean-Michel Van Schouwburg qui me présenta. Adossé au mur du fond de la salle du Red Rose près de sa contrebasse, le sourire aux lèvres, heureux de la musique que tu écoutais avec une grande attention, heureux des séances d’enregistrement que tu venais de réaliser avec certains des musiciens présents ce soir là.

Je me rappelle de notre conversation, de mon étonnement sur ses choix de vivre en France, d’apprendre et parler français alors que nous évoquions, dans un éclat de rires, la grande rareté de nos concerts, de nos invitations à jouer en France et de la nécessité de venir à Londres, au Royaume Uni et vers d’autres pays pour enfin jouer et rencontrer des compagnons de jeu.

J’étais triste et révolté que tu ne sois que très rarement invité à jouer en France.

Mais ce qui te motivait essentiellement était ton Label Bruce’s Finger, tes compositions et tes rencontres avec les musiciens.

Ce soir-là nous nous sommes quittés avec la promesse que je t’inviterai à jouer à la première édition encore en cours de préparation du festival R de choc…

Simon me fit l’amitié, la joie et la générosité de venir jouer à quatre éditions du festival. Amitié et générosité que me firent aussi les autres musiciens qui vinrent jouer aux différentes éditions.

La première édition qui eut lieu le 6 et 7 juillet 2008, à l’image des Companies de Derek Bailey, recevait Steve Beresford, John Russell, Roger Turner, Philipp Wachsmann et côté français, Dan Warburton, Michel Doneda, Jean Bordé, Bertrand Gauguet, Hars, Simon Fell, Catherine Karako et moi.

Je me rappelle la gentillesse, la discrétion, la confiance de Simon et de son enthousiasme à jouer avec des musiciens qu’il ne connaissait pas encore, son exigence et son intégrité musicale et humaine.

Simon était un musicien rhizome, un musicien pluriel, à la pensée-rhizome et dont la première langue est la musique, les sons et les rythmes. Ce rhizome par opposition à la racine unique dont Edouard Glissant dit à la suite de Deleuze et Guattari « La racine unique est celle qui tue autour d’elle alors que le rhizome est la racine qui s’étend à la rencontre d’autres racines. »

Cela s’entend lorsqu’il joue, improvise ou compose. 

Toujours à l’écoute, parfois précédant le jeu à venir vers des territoires encore inexplorés et entraînant les autres avec lui ou bien les accompagnant dans l’aventure en offrant de la profondeur de champ.

Parfois presque silencieux lorsqu’il perçoit la fragilité de certains instants et s’effaçant lorsqu’il sent que la musique jouée à cet instant ne nécessite rien d’autre. 

Avec Simon une mélodie, un chant peut se transformer en sons texturés, bruits ou bien surgir de grincements, frappes. Aucun espace, aucune direction, aucun jeu ne sont interdits.

C’était un compagnon de confiance, un musicien rare à tous points de vue.

Sa discrétion tout comme son refus de jouer lorsque la musique et les musiciens étaient dévalorisés n’ont pas permis à ce qu’un musicien aussi exceptionnel et d’une telle envergure comme Simon H. Fell soit davantage programmé en France. Par manque de curiosité, de connaissance ? Par esprit de chapelle pour un musicien archipel ?

Heureusement, il nous reste ses disques, de rares films en concerts et des archives du festival R de choc restées en France et que j’espère pouvoir publier un jour.

Alors...au revoir Simon ! prononcé en français comme il aimait qu’on l’appelle dans son petit village de la Creuse à Teillet, St. Dizier-Leyrenne.

Londres, le 10 août 2020

 



English version

I remember the day I met in London, May 7, 2007 during the Freedom of the City festival, at the Red Rose, a "Comedy Club" which hosted, among others, John Russell's Mopomoso and the London Improvisers Orchestra. This edition of the now defunct festival was recorded by the BBC for the Jazz on 3 program.
That day, I was invited to play a solo, the only solo of the festival while I would have liked to play with so many others who were playing that day like John Russell, Ute Wassermann, Chris Burn, Philipp Wachsmann, Alex Ward, Dominic Lash, Hannah Marshall, Javier Carmona, Paul Rutherford, Marcio Mattos, Veryan Weston, Evan Parker, Agustí Fernández, John Edwards, Eddie Prévost… musicians who for some became close friends, playmates as well as guests of the R de Choc Festival in Paris that we were organizing with Catherine Karako.

It was Jean-Michel Van Schouwburg who introduced me. Leaning against the back wall of the Red Rose room, Simon near his double bass, a smile on his face, happy with the music he listened with great attention, happy with the recording sessions he had just made with some musicians present that evening.

I remember our conversation, my astonishment at his choices to live in France, to learn and speak French while we spoke, in a burst of laughter, the great rarity of our concerts, our invitations to play in France and of the need to come to London, UK or other countries to finally play and meet playmates.

I was sad and revolted that you were very rarely invited to play in France.

But what motivated you mainly was your Bruce's Finger Label, your compositions and meetings with musicians.

That evening we parted with the promise that I will invite you to play at the first edition still in preparation for the R-2-Choc festival.

Simon made me the friendship, the joy and the generosity to come and play in four editions of the festival. Friendship and generosity which the musicians who came to play at the different editions also showed me.

The first edition which took place on July 6 and 7, 2008, like the Companies of Derek Bailey, welcomed Steve Beresford, John Russell, Roger Turner, Philipp Wachsmann and on the French side, Dan Warburton, Michel Doneda, Jean Bordé, Bertrand Gauguet , Hars, Simon Fell, Catherine Karako and me.

I remember Simon's kindness, discretion, confidence and his enthusiasm for playing with musicians he did not yet know, his high standards and musical and human integrity.

Simon was a rhizomatous musician, a plural one, rhizome-thinking musician whose first language is music, sounds and rhythms. This rhizome as opposed to the single root of which Édouard Glissant says following Deleuze and Guattari "The single root is that which kills around it while the rhizome is the root which extends to meet other roots. "

This can be heard when he plays, improvises or composes.

Always attentive, sometimes preceding the game to come towards unexplored territories and drawing others with it or accompanying them in the adventure by offering depth of field.

 

Sometimes almost silent when he perceives the fragility of certain moments and disappearing when he feels that the music being played at that moment does not require anything else.

 

With Simon a melody, a song can be transformed into textured sounds, noises or even arise from squeaks, hits. No musical fields, directions or playing were forbidden.

He was a trusted companion, a rare musician in every way.

His discretion, like his refusal to play when music and musicians were devalued, did not allow such an exceptional and stellar musician like Simon H. Fell to be more programmed in France. For lack of curiosity, of knowledge? By spirit of chapel towards an archipelago musician?

Fortunately, we still have his records, rare films in concerts and archives of the « R de Choc » festival remained in France and which I hope to be able to publish one day.

So ... goodbye Simon! Simon pronounced in French as he liked to be called in his small village of Creuse in Teillet, St. Dizier-Leyrenne.

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