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Jazz à Paris
12 avril 2021

John Butcher, John Edwards, Mark Sanders : Crucial Anatomy

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C’est le 2e album de ce trio qui s’est donné un nom surprenant : « Last Dream of the Morning ». Chacun y mettra la malice qu’il voudra.

En tout cas, une musique vigoureuse, inventive, saisissante, qui bouscule nos sens.

Qu’il s’agisse de l’extraordinaire musicalité des frappes « négligentes » de Mark Sanders ou de ses crépitements erratiques, de l’agilité impressionnante, tumultueuse sur les cordes de John Edwards ou des sonorités rugueuses, vibrionnantes, par moments vaguement nasillardes du sax de John Butcher, tout dans « Free of Ghosts » nous déconcerte, nous chavire dès les premiers instants. Inutile d’espérer une quelconque stabilité des discours, l’impermanence est de règle. Le sax interrompt parfois ses introspections hypnotiques, ses quasi drones, ses pérégrinations sur les timbres, pour lancer des interrogations courtes, des esquisses de dialogue, auxquelles répondent, ou non, ses deux amis lorsqu’ils ne sont pas eux-mêmes engagés dans des phrases tourmentées, dans des illuminations de secteurs de l’espace. Même si l’attention est captée d’abord par le sax, les initiatives jaillissent de partout, nous magnétisent.

Un sax qui parcourt bien des nuances de crépitements, une batterie qui fait de même, des cordes qui frissonnent, des notes isolées, qui claquent, la fête repart dans « Curling Vines », pièce centrale, la plus longue, de plus de 30 minutes. Des ronflements graves qui peuvent aussi bien venir du souffle que des cordes, des chocs d’origine indiscernable, des accords graves répétés sur les cordes, des éboulis, des vibrations et de ce chaos surgit une boucle percussive, éraillée au sax qui se déploie, qui se dérègle dans une sorte de transe. L’hypnose demeure lorsque les tourbillons cessent, lorsque la tension s’amoindrit. C’est que notre groupe fait continument jaillir de nouvelles configurations, des geysers ou propose des séquences minimales, désarticulées, dans des phases transitoires entre percussions et cordes, avant que le sax les retrouve avec un vocabulaire particulièrement étendu.

Ce festival se poursuit avec la dernière pièce, « Spike Oil » qu’on peut écouter ici :  

John Butcher, John Edwards et Mark Sanders nous offrent là une musique étourdissante d’invention, de subtilité, toujours en mouvement, pleinement épanouie. Ils nous régalent de multiples nuances de timbres, de sculptures mouvantes, de convergences inattendues, de proximités déconcertantes. Tous trois sont ici excellents, avec une mention spéciale pour un Mark Sanders décidément dans une forme éblouissante. 

Concert enregistré au Café OTO, cet enregistrement illustre, si besoin était, la superbe vitalité de l'improvisation libre britannique. 

Un album de Trost Records, un label à suivre. https://trostrecords.bandcamp.com

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