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Jazz à Paris
15 avril 2021

Clément Janinet, Élodie Pasquier, Bruno Ducret « La Litanie des Cimes » (Gigantonium)

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Voici un trio qui pratique le grand écart entre notre géologie musicale aux couches enchevêtrées et la fascination de nouveaux spectres sonores de l’autre. Se servir de l’un pour transgresser, pour des frissons charnels nouveaux. Avec, en prime, des fragrances de voyages.

Qu’on prenne « Blues ». Le soleil écrasant du Sud profond, la désespérance solitaire, cinq notes répétées d’un côté, le quasi érotisme de l’alliage des timbres de l’autre. L’intérêt est accroché dès cette ouverture. Avec le titre suivant, « Ciel », des frottements stationnaires, des notes qui peinent à s’extraire de souffles, puis un motif répété de 4 notes qui nous ramène vers une Europe d’antan, alors que les deux archets créent un brouillage, un décalage vers un ailleurs indéfinissable. Un quasi drone  via les deux instruments «accompagnateurs», une faible amplitude chromatique mais un beau déploiement de timbres : le lyrisme de l’instrument soliste, ici la clarinette, trouve alors le terreau propice à son épanouissement. 

Le Sud profond, l’Europe, et bientôt un espace évoquant tout autant les gamelans d’Asie que les mbiras africains, une rythmique hypnotique qui surgit des cordes pincées du violon et du violoncelle, alors que la clarinette basse développe une ample mélopée.

Clément Janinet sollicite souvent son instrument d’une manière peu conventionnelle. Il aime à pincer les cordes de son violon, à faire crépiter ses notes, mais il retrouve l’archet pour une valse. Une sonorité décalée, un peu grinçante, une manière de distanciation. Un moment, sous l’impulsion de la clarinette d’Élodie Pasquier, cette danse prend une certaine ampleur, nous faisant esquisser quelques pas, un élancement du corps, mais inévitablement, cette valse dérape un peu, prend insidieusement une rythmique et des couleurs médiévales au violoncelle de Bruno Ducret, en une forme de contrepied aux tourbillons du violon, qui va de son côté humer le vent au large de l’Irlande.

On pourrait ainsi continuer d’arpenter les paysages inattendus que propose ce trio. Cet album finit d’ailleurs sur l’évocation d’une tradition japonaise, « Hanami », celle de s’émerveiller de l’éclosion des fleurs des cerisiers. Les séductions, les surprises jaillissent de cette réinvention de leur culture musicale, des souvenirs réels ou supposés, des influences d’ailleurs. Une manière de souligner l’extraordinaire plasticité de ce jazz qui n’en finit pas de tout digérer pour des recompositions originales. Une forme de pulsion vitale, régénérante. 

Un autre bel album de Clément Janinet à découvrir, si ce n'est déjà fait : Space Galvachers

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