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Jazz à Paris
21 novembre 2019

Michel Doneda et Tatsuya Nakatani (29 octobre 2015. Seattle)

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Toujours à l'affût pour distiller les meilleurs conseils d'écoute, Daunik Lazro avait posté un solo de Tatsuya Nakatani. Impressionnant. A-t-il déjà joué avec lui ? Non, mais Michel Doneda oui. Recherche rapide et repèrage de cette gemme de 25 minutes.

Ce set se présente en 3 partie. 

Dans la première, Michel Doneda joue seul, Nakatani étant dans une posture d’écoute. Il aborde son solo mezza-voce mais déjà en sons doublés, troublés. Puis le discours s’enhardi, avec des salves inattendues et puissantes, une agressivité sonore quasi animale. En à peine six minutes, il nous offre un festival fait d’attaques soudaines, de grands coups de griffes, de matières sonores incroyablement riches, complexes, changeantes comme ces traces chromatiques diverses dans l’épaisseur d’une gouache étalée au couteau. Sidérant !

Nakatani se saisit d’une cymbale qu’il pose sur un bol de métal lui-même posé sur un tom et un dialogue s’instaure. Questions-réponses, mimétismes, antagonismes, il est continu. Michel Doneda reprend ses explorations fulgurantes, ses circonvolutions sans reprise de souffle, ses grognement, ses ronflements, alors que Tatsuya Nakatani frappe, hors de toute pulsation régulière, des chocs puissants ou des frottements, des grincements, avec une science de l’enchaînement des timbres et du discours étonnants. Puis, Nakatani choisit l’une des figures qu’il semble apprécier, ses divers frottements sur métaux, ou l’archet sur la tranche d’une cymbale par exemple, ponctuée de chocs de grosse caisse, de grelots, de clochettes. Doneda  marque un temps d’observation, change d’embouchure et balaie l’espace de son instrument. Il reprend un chant doublé saisissant, se livre à des éructations, des grommellements sous une averse de petits chocs, de frottements. Le discours alterne alors sérénité et violence, murmures et virulence, cadenassant toute notre attention.

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Puis Tatsuya Nakatani semble faire un peu de ménage sur sa batterie, en musique évidemment, et y installe son futur dispositif,  en particulier une cymbale sur un tom et une autre suspendue (un gong?), et entame une phase nouvelle, alors que Doneda s’écarte et sort de scène. 

Un archet frotte la tranche du gong, avec assiduité, comme le ferait un menuisier sciant une planche. Et de ce  mouvement qui semble se répéter continûment sont issues des palettes de sons incroyablement variés et complexes, nous laissant perplexes sur l’origine des ces changements. Ces frottements sont associés à des frappes de grosse caisse, des grondements, des orages parfois, qu’on ne peut voir, accroissant encore notre perte de repères. Une sorte de musique de l’espace. Et quand vient la phase d’accalmie finale, la grosse caisse se contente de ponctuer alors qu’une mélodie étrange, un peu mélancolique, faite de trois notes jouées sur le gong, vient vriller notre mémoire. On ne l’oubliera pas. 

On reste fasciné par cette constellation sonore issue du néant dans une économie de moyens. Un démiurge en action.

 Après ces quelques mots, place à la musique :


Ce duo est l’un des plus remarquables que nous offre la scène improvisée. Maîtrise instrumentale et richesse du discours paraissent naturelles. Tout est fluide et furieusement neuf et saisissant.

Une autre vidéo, plus courte mais en couleur, datant de 2011, est disponible là : 

https://youtu.be/KJkqnT_qYuc

 La qualité de ce duo avait été signalée par JM Van Schouwburg dans sa liste Improvisateurs japonais à la rencontre du monde : une discographie (par Jean-Michel van Schouwburg) - Jazz à Paris 

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