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Jazz à Paris
12 mai 2015

Tripes "Suicide Jazz" par Claude Parle

photo Théo Jarrier
photo de Théo Jarrier (voir autres photos de cette soirée)

Dernier disque de Tripes en date, "Suicide Jazz". J'assemblais mes idées pour une chronique de ce CD lorsque Claude Parle et Etienne Brunet ont chacun rédigé un article au sujet du concert de ce trio au Souffle Continu, le 7 mai dernier. Deux beaux textes, très différents l'un de l'autre. Il ne me restait plus qu'à remiser ma plume d'oie et à quémander l'autorisation de relayer lesdites chroniques. C'est accepté. Aujourd'hui, la chronique de Claude Parle.

Jeudi 07 Mai 2015 @ Souffle Continu : Tripes "Suicide Jazz’’ :
Jean-Brice Godet - Clarinettes.
Julien Chamla – Batterie.
Marco Quaresimin – Contrebasse.


Surprenante initiative que ce trio inédit  ! ...
Ça fonctionne avec la bonne vieille technique du ∆ (Delta) mais ça vit et ça sonne comme de l'électro ! ...
Des ∆ qui glissent se chevauchent et se perdent, des ∆ qui s'emboîtent les uns dans les autres, qui fusionnent et finissent par former des cellules et ces cellules par leurs obstinations finissent par donner des organites qui à leur tour engendrent des hybrides, des organismes qui semblent naître à la vie ...
Et cette vie donne naissance à des rejets, rejets qui s'étendent, s'accumulent, s'assemblent et engendrent à leur tour des éléments de plus en plus vastes, de plus en plus complexes jusqu'à générer des mondes, des stolons de galaxies tourbillonnant furieusement dans un univers dont l'accrétion fonde l'expansion ...
Puis tout se calme dans une chréode ... le temps dilue l'espace, les résonances dilatent les matières et semblent s'adsorber en nos tympans dans une alchimie intime et secrète ...

Ce qui fonde l'intérêt du "procédé", qui comme chacun sait est l'apex du billard ! ... ce sont les combinatoires dont le choix revient à celui des musicien qui en prend l'initiative. Moyen royal de sortir de l'ennui de la répétition sans lâcher pour autant la fascination née de de l'hypnose itérative. La cohésion remarquable de ce trio fait qu'il en résulte une sorte d'aquarelle sonore où chaque élément distinct des autres s'emmêle quand même à ceux-ci sur ses franges, où il semble générer ces sortes de moires issues des objets fractals en fausses couleurs créés par les machines ...

La vision qui nous vient de l'ensemble oscille sans cesse entre un paysage de mer inlassable en ses assauts recréés et une immense Babouchka non linéaire dont chaque emboitement serait de même taille que son précédent ...
Cela porte et transporte l'auditeur entre le son et l'intime, comme si son tympan s'enroulant sur lui même en se retournant devenait une variété à un seul bord, une surface de Moebius trans-formant le sonore en matière habitable ...

Et cela ne serait encore rien si l'on ne parle de l'introduction de la voix, la "voix humaine", ce jeu d'orgue impossible à accorder, cauchemar des registrants ...
C'est Marco qui à certains moments de la séquence introduit aussi sous la forme du ∆ une modulation subtile allant presque jusqu'au cri.
Introduire ainsi la voix semble appuyer Tomatis, qui jadis en ses écrits faisait de la peau toute entière une immense oreille ! ... Là, le corps du son et le corps de l'auditeur s'identifient, les poils se dressent ainsi qu'au sein du labyrinthe, les cellules ciliées s'émeuvent de l'ivresse qu'elles conduisent au cerveau. Faire de la voix une émergence constitue de manière paradoxale le moyen électif de la réalisation comme présence du lien sonore où baignent sympathiquement acteur musicien et actant auditeur, cela semble abolir les frontières du proche et du distant, du mouvant et de l'immobile ...

"Mobilis in mobile" devise gravée sur les couverts du Nautilus, hallucination propitiatoire du précurseur, Nemo, de l'exploration des fonds inconnus et inaccessibles des océans d'inconscience qui portent les continents.

Saluons et souhaitons à ce trio de ne pas se perdre dans les labyrinthes d'univers Dickiens et de continuer à nous inviter à ses excursions transplanétaires ...

C.P

Tripes Suicide Jazz CD cover

 

Retrouvez toutes les chroniques "CD etc.".
Retrouvez toutes les brèves de concert .

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